« C’est important pour moi d’être active dans ma communauté en dehors du travail »
Je suis née et j’ai grandi à Tanger, et je suis basée à Casablanca actuellement.
J’étais en première année du bac dans mon lycée (marocain), et mon père en allant au lycée me posa cette question: “Est-ce que ça te dirait d’aller passer 10 mois aux USA?” Sa question m’a un peu prise de cours car je n’étudiais l’anglais que depuis 5 ans, et que je ne visais pas du tout les USA pour mes études supérieures. Mon père me parla alors d’un programme d’échange- le Youth Exchange and Study Program (YES)- créé par le département d’état américain dans le but de promouvoir l’échange culturel et créer des ponts entre les USA et le monde arabo-musulman. Après quelques discussions avec mes parents, j’ai postulé et j’ai été acceptée au programme, et c’est ainsi que je suis partie à 16 ans, en Août 2008 au Rhode Island, petit état du nord-est des Etats-Unis, et que j’y ai vécu pendant 10 mois avec une famille américaine. J’étais en terminale au lycée de la petite ville de East Greenwich où j’habitais. Je me suis impliquée dans la communauté, à travers des activités comme la collecte et distribution de dîners pour les sans-abris, ou passer du temps avec des personnes âgées dans la maison de retraite de la ville, entre autres. Ces expériences m’ont permis de bien m’intégrer dans la communauté et de mieux comprendre l’esprit et la culture américaine. Mon année là-bas m’a aussi permis d’acquérir plus de maturité, d’être plus indépendante, et d’entrevoir de nouveaux horizons auxquels je n’aurais pas songé avant cette expérience.
L’idée d’étudier aux USA a commencé à germer dans mon esprit durant mon année d’échange, et j’ai commencé à préparer mon dossier là-bas déjà, en me préparant pour les différentes épreuves - SATs- nécessaires pour postuler. C’est un format assez différent d’un examen typique du lycée et donc ça a pris beaucoup de travail pour préparer ces examens. Il fallait aussi réunir les autres éléments du dossier, comme l’essai personnel, qui est censé montrer qui on est et faire voir notre potentiel au comité d’admission. J’étais d’autant plus motivée que j’avais visité quelques universités, dont Harvard, et que le système éducatif (libéral où on peut prendre des cours dans des domaines différents en plus de sa spécialité principale). Donc après beaucoup de travail, et un peu de chance, j’ai été acceptée au programme Bachelor (bac + 4), où j’ai obtenu un diplôme dans les sciences politiques et économiques. Je dirais aux lycéens qui rêvent d’aller étudier dans les prestigieuses universités américaines qu’ils doivent y croire et de s’informer sur les procédures d’admission des programmes et universités qui les intéressent, surtout que certaines d’entres-elles offrent des bourses d’études, et qu’avec du travail et de la persévérance, rien n’est impossible.
Je me suis impliquée très vite dans différents groupes et activités tout au long de mes 4 ans à l’université, et avec une amie, nous avons remarqué qu’il y avait beaucoup d’étudiants francophones à Harvard, mais qu’il n’y avait pas d’organisation ou d’événements pour cette communauté. C’est là qu’on a créé l’association pour promouvoir les cultures des pays francophones à travers plusieurs événements culturels et rencontres qu’on organisait. On a d’ailleurs pu rencontrer et faire visiter notre campus à Jamel Debbouze et à Gad El Maleh après leurs spectacles respectifs à Boston!
Je fais aussi partie du comité de direction de la Harvard Arab Alumni Association, qui regroupe les lauréats de Harvard de la région MENA. L’organisation a pour but de promouvoir le monde arabe et sa culture au sein de l’université, et de ramener Harvard dans la région, à travers plusieurs conférences et colloques organisés tout au long de l’année. Chaque année en Novembre, nous organisons avec les étudiants de Harvard la plus grande conférence sur la région MENA dans l’Amérique du Nord. La conférence, Harvard Arab Weekend, se passe sur 4 jours, où près de 1300 étudiants et professionnels des USA et de partout dans le monde viennent assister à des panels sur différents sujets, de la politique à l’économie en passant par l’art et la culture. On a accueilli au fil des années des personnalités éminentes dans différents domaines, comme la Reine Rania, Amr Moussa, ou Mustafa Terrab. On organise aussi une conférence annuelle dans le monde arabe, et les trois dernières éditions ont eu lieu au Maroc, à Oman et en Jordanie. En marge des conférences, on organise aussi des séminaires pour encourager les étudiants de la région à postuler aux différents programmes de l’université, et on lève aussi des fonds pour des bourses pour les étudiants arabes à Harvard.
Experience Morocco est née de ma rencontre avec mes deux partenaires, Ghassan et Hicham, lors d’un dîner des étudiants marocains à Harvard, où on n’était qu’une petite quinzaine. Bien que mes deux futures collaborateurs étaient en MBA et que j’étais en bachelor, nous partagions tous les trois l’envie de rentrer au pays et de combiner nos expériences et nos visions pour créer de la valeur ajoutée au Maroc. On ne savait pas exactement dans quel secteur on voulait s’engager, et l’idée de créer une compagnie de voyage est un peu venue par hasard, car on a été motivé par les demandes de nombreux de nos amis qui voulaient qu’on organise pour eux un voyage au Maroc. C’est en organisant ce premier voyage qu’on a vu qu’il y a avait des opportunités pour innover dans le domaine.
Notre mission est de changer les perspectives et perceptions de voyageurs qui viennent découvrir notre pays. Pour beaucoup d’entre eux, c’est leur premier voyage dans un pays arabo-musulman et africain, et donc on essaie de leur offrir une panoplie d'expériences qui leurs font découvrir les différentes facettes de notre pays et de notre culture.
Je pense que ça m’a aidé à voir une perspective différente sur les opportunités qui existent au Maroc, et de voir qu’il y a plusieurs manières de faire progresser les choses, et que tout est possible avec de la discipline, de la persévérance et une bonne dose de créativité et d’imagination.
C’est important pour moi d’être active dans ma communauté en dehors du travail, et c’est pour cela que j’ai rejoint le Hub de Rabat des Global Shapers, qui est la communauté des 20 à 30 ans du Forum Économique Mondial, et on s’implique dans plusieurs initiatives dans la région de Rabat. Parmi les projets qu’on a réalisés ces dernières années, je citerais le Shape Africa, conférence sur le continent qu’on a organisé à Rabat, une collecte de don de sang, et un projet de mentoring de femmes qui viennent de créer leurs entreprises. Le volontariat me tient aussi à coeur, et c’est pour cela que je me suis rendue en Grèce deux fois l’année dernière pour travailler avec une ONG qui aidait les réfugiés qui arrivaient à l’île de Lesvos depuis la Turquie.
Mes parents ont joué un rôle primordial dans ma vie et dans notre éducation à ma soeur et à moi. Mon père a toujours était présent, et nous a accompagné dès notre plus jeune âge, et tout au long de nos parcours scolaire en nous encourageant à toujours viser plus haut et rêver plus grand. Je me souviens de mes discussions avec lui quand j’étais plus jeune, et on parlait de tout, d’infos, d’articles qu’on lisait ensemble, et il m’encourageait toujours à poser des questions et à être plus curieuse, sans jamais me dire que j’étais trop jeune pour comprendre, ou qu’il ne fallait pas parler de tel ou tel sujet. Ma mère nous a aussi encouragé ma soeur et moi à passer les 10 mois aux USA pour le programme d’échange à 16 ans, chose qui n’a pas été facile pour elle, mais elle savait à quel point cette expérience serait bénéfique pour nous.
Pour le moment, continuer de monter le projet et faire grandir notre entreprise. Après, j’aimerais bien poursuivre un master dans le business ou le développement international.
Imane Karroumi
Née le 15 Mai 1992
À Tanger
Vit à Casablanca
Profession : Associée et Directrice Sales à Experience Morocco