Nadia Benbahtane

Visage du Maroc
Jan 10, 2023

« La réalité est que je me sens en confiance et en paix quand je nage en eau libre »

D’où venez-vous et où vivez-vous ?

Alors de manière littérale, je suis née et j’ai grandi à Rabat. Et puis en 1996, je suis venue à Casablanca pour mes études et je n’ai plus quitté cette ville aux mille visages…J’y suis installée avec ma famille.

Après j’aurais envie de te dire que j’ai un deuxième «chez moi » quand je suis dans l’eau ☺

Quelles études avez-vous poursuivies et pourquoi ce choix d’étude ?

J’ai étudié à l’ISCAE . Des études de management avec une dominante en marketing.

J’avais 17 ans quand j’ai dû choisir …et le bac obtenu, j’oscillais encore entre la fac de médecine et l’ISCAE. Le management l’a emporté. Je me suis dit à ce moment, il là était plus simple de faire un virage après 4 ans plutôt qu’après 7 ou 12 … Et que les premières années à l’ISCAE, de par la variété des sujets, me permettraient d’y voir plus clair sur ce que je voulais faire finalement.

Vous avez débuté chez Microsoft, en quoi cette première expérience dans une multinationale américaine a été bénéfique à votre carrière ?

Pour moi c’était une deuxième école. De mon cubicule à Casablanca, j’avais accès à du savoir et de l’expérience de tous les pays. Et j’ai tout de suite été immergée dans une culture très forte. Ça été ma première exposition à l’importance de cultiver un système de valeurs commun et une même culture comme leviers d’engagement, d’alignement stratégique et donc finalement de performance à l’échelle d’une multinationale. Et évidemment dans des entreprises comme Microsoft, on apprend à travailler vite, à être orienté résultat, à travailler en transverse …

Et ce qui m’avait impressionnée à 21 ans, c’était l’accessibilité, l’ouverture des gens quel que soit le niveau hiérarchique. Ça vous encourage quelque part à garder l’audace de la jeunesse ☺

Plus sérieusement, ça décomplexe quelque part et libère. Sentir que l’on a également sa place dans un groupe, même en étant jeune, avec moins d’expérience, se sentir écouté, encourage à prendre de l’initiative et à se surpasser.

Comment avez-vous intégré l’équipe d’Intelcia et quel a été le rôle que vous avez joué dans son développement ?

J’ai rencontré Karim Bernoussi, un des fondateurs et CEO d’Intelcia ainsi que Youssef El Aoufir, Deputy CEO,  à Microsoft. J’ai eu le plaisir de travailler déjà avec eux là-bas.  Et bien que j’aie évolué dans d’autres entreprises après, j’ai suivi la naissance de la marque d’Intelcia et les premiers développements de l’entreprise. En 2012, et suite au premier développement à l’international en France, un investissement durable dans la communication devenait nécessaire. Nous en avons parlé et le projet de structurer la marque, la communication etc … m’a tout de suite séduite.

Comme je le dis souvent aux candidats que je rencontre, une chance comme celle-ci arrive rarement deux fois. Intelcia est une aventure où on peut construire. Quand j’ai rejoint en 2012, Intelcia comptait 2000 personnes sur 2 pays. Aujourd’hui, nous sommes plus de 40 000 dans 17 pays et les ambitions sont encore plus fortes ; et cela avec une même marque et une même culture.

Ma fierté est d’avoir contribué à ce développement en structurant la marque et les leviers d’engagement qui aujourd’hui servent l’ensemble du Groupe. Je suis toujours très émue de voir la marque Intelcia portée par les équipes et des collègues dans les différents pays.

De plus, de par l’ADN d’Intelcia, j’ai la chance de pouvoir travailler avec mes collègues et les équipes sur un sujet qui me tient fortement à cœur : l’impact positif que l’on peut avoir durablement, à travers notamment les actions menées au niveau de la RSE.

Et j’ai envie d’ajouter qu’une des particularités d’Intelcia est qu’on peut y exprimer sa singularité sur un terrain de jeu sans limites.

Cela fait un peu plus de dix ans que je suis là et aucune année ne ressemble à une autre !

D'où vous vient votre goût pour le sport en général et la natation en particulier ?

Le sport était mon principal loisir étant plus jeune. J’ai pratiqué différents sports, encouragée par mon père. Il s’était même inscrit avec moi au Karaté quand j’ai dû passer aux cours du soir pour joindre l’utile à l’agréable. Lui-même pratiquait beaucoup de sports plus jeune. Il devait m’accompagner et me ramener tard le soir. Il disait que ça lui faisait une activité sportive. Je sais qu’il le faisait aussi pour me soutenir, particulièrement au cours des dernières années du lycée, et pour m’encourager à ne pas lâcher. Le Karaté a été un sport très structurant en termes de discipline, d’engagement et de respect de l’autre.

Alors la natation… je pense que c’est un sport vers lequel je suis allée naturellement. J’ai découvert tardivement que mon père a nagé un peu en club plus jeune. Cela n’a pas été mon cas. Mais j’observais les nageurs et je trouvais ce sport très élégant. Et puis un jour j’ai décidé de nager aussi. Et « ado », j’ai découvert que je me sentais bien dans l’eau en enchainant les longueurs. Mon premier 3 km en piscine remonte à mes 15 ou 16 ans. Je m’étais juste mise à l’eau et j’ai nagé jusqu’à me sentir bien. Et cela a été le cas à différents moments de ma vie plus tard jusqu’à ce que je découvre l’eau libre…

Adolescente, j’ai aussi travaillé les étés en piscine pour aider des enfants à apprendre à nager ☺.

Comment vous est venu l'idée et l’envie de traverser le détroit de Gibraltar à la nage ?

Grâce à la course à pieds ☺.

A la fin de mon premier marathon, j’étais convaincue que j’aimais les sports d’endurance. En revanche je me disais qu’il était dommage que ce ne soit pas en nageant. Alors j’ai commencé à chercher l’équivalent de la course à pieds pour amateur dans l’eau. J’ai découvert l’eau libre et qu’il n’y avait aucune limite de distance ! L’eau libre finalement, c’est de nager tant qu’il y a de l’eau sans repères délimités. Et au fil des recherches mais aussi des rencontres, j’ai découvert la traversée du détroit. Et c’est devenu une quasi obsession. J’y suis allée au début par challenge et puis au fur à mesure que j’attendais mon tour, que je me préparais … je savais que je n’y allais plus par goût du challenge, ou pour une réalisation sportive. J’y allais par besoin et instinctivement je savais que j’allais à la découverte d’une part de moi, d’une nouvelle relation …

Et ce fut le cas, ce 28 avril 2015 …

Pouvez-vous nous décrire ce que vous ressentez quand vous pratiquez la nage libre ?

On me demande souvent si je n’ai pas peur de nager en haute mer, de ne pas voir le fond, des rencontres « marines » potentielles. Et la réalité est que je me sens en confiance et en paix quand je nage en eau libre. Evidemment je ne prends pas de risques inutiles. Mes priorités sont claires.

Et je ne cherche pas la performance. Ce qui est important pour moi c’est de me préparer comme il faut pour pouvoir vivre des moments de communion avec l’océan notamment …

Ce n’est pas toujours le cas. Lorsque les conditions sont difficiles en mer surtout, parfois on est plus concentré sur comment passer un courant, comment faire face aux vagues, au vent …

Et puis certaines fois, l’océan me fait cadeau de moments de grâce … où je me sens pleinement accueillie et connectée à moi-même mais surtout à quelque chose de plus grand… et ça me ressource.

Comment est née l’aventure Pink Wave ?

Le 22 août 2018, j’étais à Taghazout en famille. Nous avons appris la triste nouvelle du décès de ma tante, 3amti Khadija des suites d’un cancer qu’elle avait combattu longtemps.

Je n’avais pas pu lui dire au revoir proprement car elle habitait en-dehors du Maroc. Nous avons juste échangé, quelques jours avant, quelques mots au téléphone et beaucoup de tendresse. Son dernier message : vivre pleinement, avec passion et sens.

Naturellement, j’ai pensé à nager à sa mémoire et pour lui dire au revoir. Et je me suis dit… un jour je nagerai entre Taghazout et Agadir. Je n’avais aucune idée, ni de la distance, ni des courants …  Ça ne s’est pas fait tout suite pour diverses raisons.

Et en 2022, l’idée Pink Wave est née grâce au soutien de plusieurs personnes, notamment mon équipe. Comme je leur ai dit, ils sont le vent qui a créé la vague devenue Pink wave. Ils connaissaient la promesse que j’avais faite, celle de nager à la mémoire de ma tante. Alors pour mon anniversaire en février, ils m’ont offert un billet et un séjour pour aller à Taghazout à condition de nager ! Et tout a démarré. J’ai eu des amis, des partenaires qui ont embarqué dans l’aventure et Pink Wave est née.

Pink Wave pour nager pour soutenir symboliquement des guerrières comme ma tante.

Nager pour honorer son courage ; elle qui a toujours diffusé la joie, l’amour et l’espoir autour d’elle.

Nager à contre cancer, et créer une vague d’espoir !

Qu’avez-vous ressenti lors de votre décoration par Sa Majesté le Roi Mohamed VI ?

Un moment inoubliable évidemment.

J’ai ressenti beaucoup de fierté de pouvoir être reçue en tant que nageuse. C’était pour moi la réalisation d’un rêve de petite fille, d’être, même pour un instant, une nageuse. C’était aussi une grande fierté d’entendre le nom de mon Papa annoncé à haute voix … La natation et le sport en général, c’est grâce à son soutien et sa transmission de la valeur de travail et d’engagement. Et le sport représentait tous les moments que l’on partageait. Et c’était aussi une reconnaissance pour ma mère qui a toujours était un exemple d’abnégation quand il fallait réussir des choses importantes.

Au-delà de la fierté, j’ai ressenti beaucoup de gratitude d’avoir eu cette reconnaissance et de l’intérêt porté aux femmes et à un sport comme l’eau libre. C’était un moment pour moi porteur de beaucoup de symbolique.

Comme disaient mes filles, au-delà du challenge sportif, j’étais une maman qui avait décidé de traverser un détroit …

J’ai vécu un autre moment de grâce ce jour-là et je suis reconnaissante à sa Majesté pour la décoration mais aussi pour les mots qu’il a eus pour chaque personne qu’il a reçue.

Quel conseil donneriez-vous aux personnes qui veulent pratiquer la nage libre ?

D’oser se jeter à l’eau ☺

Comme chaque sport et pour tout d’ailleurs, je pense qu’il faut y aller avec curiosité et ouverture et sans pression. Découvrir et voir si on a un « fit » avec ce sport et trouver sa raison de nager … pour la santé, pour le plaisir, pour le challenge ou tout simplement pour des moments de partage avec d’autres nageurs.

Après pour moi, le point le plus important à garder en tête est que nager en eau libre n’a rien à voir avec nager en piscine. Ça parait anodin, mais il faut le garder en tête pour ne jamais prendre de risque inutile. Il faut être conscient de la puissance de la nature et la respecter.

Donc, le conseil le plus important pour moi est de s’assurer de sa sécurité.

Quel est votre prochain défi ?

Une nouvelle traversée Pink Wave.

Aujourd’hui Pink Wave est porté par un collectif qui partage la même envie de créer cette vague d’espoir. Alors on va réfléchir à comment structurer l’action autour de Pink Wave. Et une nouvelle traversée en fera sans aucun doute partie au Maroc mais aussi ailleurs.

Avec une amie italienne, nous envisageons une collaboration avec une association en Italie aussi …

Voilà ☺

En Bref

Nadia Benbahtane

Née le 18 Février 1979

À Rabat

Vit à Casablanca

Profession : Group Chief Brand and Engagement Officer - Intelcia

Visage du Maroc
Jan 10, 2023
Partager cette interview

Interview Précédente

Interview Suivante

Il n'y a pas d'interview plus ancienne !

Afficher la liste des interviews

Il n'y a pas d'interview plus récente !

Afficher la liste des interviews

Visage
du Maroc
Inscrivez-vous à notre newsletter pour être informé des dernières interviews et publications.
S'inscrire
En vous inscrivant, vous acceptez nos Termes et Conditions et consentez à recevoir des mises à jour de notre part.
Thank you! Your submission has been received!
Oops! Something went wrong while submitting the form.
© 2024 Visage du Maroc. Tous droits réservés.